Introduction

Dans les années 1920, après la Première Guerre Mondiale, dans un esprit de réconciliation et de rapprochement des peuples, les premiers chantiers de travail volontaire sont nés en Europe et en France à l'initiative du Service Civil International. Après la guerre de 1939-1945, de nouvelles associations se sont créées, rassemblant des volontaires de toutes nationalités autour de travaux concrets et d'utilité collective pour contribuer à la reconstruction des pays et de la paix, Petit à petit, les chantiers se sont développés (en nombre et en diversité), intégrant dans leurs objectifs des priorités issues des mutations sociales, culturelles et économiques, devenant ainsi des outils pour la mise en place d'équipements éducatifs et sportifs, la restauration du patrimoine, le développement local ou la préservation de l'environnement.

1 - Présentation du document

1.1 Objectifs
- Apporter une aide méthodologique à ceux qui souhaitent mettre en place de nouveaux chantiers,
- Définir un cadre de référence permettant aux bénévoles et gestionnaires d'avoir une meilleure lisibilité sur les chantiers,
- Améliorer et enrichir les pratiques existantes,
- Aider à développer les diverses dimensions que recouvre un chantier,
- Ouvrir les chantiers à d'autres activités,
- Initier de nouveaux partenariats,
- Structurer des réseaux locaux de bénévoles.
1.2 Destinataires
Ce sont les organisateurs et porteurs de projet d'un chantier nature, qu'ils soient gestionnaires d'espaces naturels, association de protection de l'environnement, centre de découverte nature, collectivité ou simple citoyen.
1.3 Utilisation
Dans la première partie, le porteur de projet confronte ses connaissances à d'autres expériences, précise ses objectifs et en découvre de nouveaux, définit le contenu de son projet et pointe les éléments importants à prendre en compte. Il pourra aussi constater qu'il n'est pas seul et peut collaborer avec d'autres structures ou personnes pour la préparation, l'organisation et la réalisation du chantier.
La deuxième partie apporte un éclairage plus précis sur des thèmes transversaux à tous les chantiers, tels que l'animation d'un groupe de bénévoles, la sécurité, l'organisation d'un séjour ou l'implication de la population locale.
La troisième partie dresse la liste des nombreuses étapes à franchir pour mettre en oeuvre un chantier, sous forme d'un pense-bête et d'un tableau de bord.
La bibliographie, un carnet d'adresses et les annexes viennent compléter l'ensemble de ces informations.

2 - Définitions de quelques termes
Sans donner une définition précise d'une activité aussi riche et variée qu'un chantier nature de bénévoles volontaires, il est nécessaire d'expliquer quelques termes utilisés tout au long de l'ouvrage.

2.1 Bénévolat et volontariat, de nombreuses interprétations
"Le volontaire est celui qui s'engage de son plein gré d'une manière désintéressée dans une action organisée au service de la communauté".
Extrait de la Charte du Centre du Volontariat (Paris).
"Le travail bénévole est un travail accompli librement. gratuitement, pour le bénéfice d'un tiers et dans un cadre organisé".
D'après une étude de l'IRIV (Institut de Recherche et d'Information sur le Volontariat) "Bénévolat : un atout pour les jeunes, une chance pour les associations".
Est considéré comme "collaborateur bénévole celui ou celle qui apporte son concours au fonctionnement ou à l'animation d'une association, comme dirigeant ou non, sans percevoir en contrepartie de rémunération d'aucune sorte". D'après le Code du Travail.
2.2 Précisions sur le vocabulaire utilisé dans ce document
Par souci de simplification, on parlera de bénévole ou de participant (plus neutres que "volontaire", devenant de plus en plus un terme officiel englobant un véritable statut).
Par contre, on parlera indifféremment de sites et milieux naturels, protégés ou sensibles, pour désigner un lieu possédant un patrimoine naturel intéressant et faisant l'objet d'un suivi (plan de gestion, réflexion sur les travaux ... ), et sur lequel on peut effectivement réaliser un chantier nature.
Enfin, le mot chantier n'a pas non plus l'exclusivité puisque certains utilisent la traduction anglo-saxonne et parlent de camp, terme se rapprochant peut-être plus de la notion globale du projet (travaux, vie de groupe, échanges).
2.3 Chantier nature, essai de définition
Réalisation de travaux de manière collective, permettant de restaurer, de préserver et/ou d'améliorer les habitats d'un site naturel, ou de le valoriser par des aménagements.
Qu'est ce que cela implique ?
- Un objectif naturaliste et éducatif.
- La réalisation de travaux pour atteindre cet objectif.
- L'exclusion de certains travaux (type nettoyage), comme de thème de chantier.
- Une approche réfléchie de la gestion du milieu naturel.
- Une démarche partenariale entre tous les acteurs.
- Des compétences naturalistes spécifiques au niveau de l'encadrement.

Le chantier nature en trois points
Un chantier nature concerne autant la réalisation d'un objectif technique, que la conduite d'un projet d'animation pédagogique et de vie de groupe.

1 - Travaux : participer à une production d'intérêt général, c'est à dire effectuer un travail utile en lien avec la gestion ou l'aménagement d'un espace naturel.
2 - Vie collective : participer aux tâches de la vie quotidienne.
3 - Découverte : découvrir une région, rencontrer des personnes et échanger avec la population locale.

Les bénévoles ont la parole    

"Je suis venue en chantier avec l'expérience de l'année précédente. J'attendais donc beaucoup d'activités et de moments intéressants: discussions, confronter nos opinions et connaissances personnelles, élargir nos horizons, dépasser les frontières ... ".

  Maja,
22 ans,
Slovaquie

"J'ai fait ce chantier car je suis intéressé par la nature et sa sauvegarde. Etant en "BEPA aménagement de l'espace rural" j'ai pensé que ça pouvait être instructif pour moi, de protéger des tritons. Ce qui m'a motivé encore plus c'est une bonne ambiance de groupe".

  Nicolas,
15 ans,
France

''Je n'attendais rien de spécial avant de venir: pratiquer le français, voir Paris et rencontrer des personnes. Tout cela je l'ai fait. Mais le chantier a été bien plus que ce que j'avais pu imaginer.
J'ai beaucoup aimé que des personnes avec des difficultés sociales soient intégrées au projet et j'ai réalisé beaucoup de choses sur moi. C'est une très bonne chose de passer quelques semaines dans un autre pays avec des personnes du même âge. Et c'est aussi une très bonne idée de permettre aux volontaires et à la population locale de se rencontrer. J'ai vraiment aimé cet échange interculturel".

  Lenka,
22 ans,
Slovaquie

 
Témoignages recueillis pendant l'été 2002 sur des chantiers organisés par le CPIE Vallée de la Sarthe (72) et Etude et Chantiers Ile de France (77).    


3 - Chantiers de bénévoles et idées reçues

3.1 "Le chantier de bénévoles fait concurrence aux petites entreprises"
Soit par la nature des travaux, soit par le projet global qu'il représente (éducation à l'environnement, implication locale, échanges ... ), un chantier ne peut et ne doit pas être comparé à une activité professionnelle, ni même en être concurrent. Les deux peuvent par contre être complémentaires.
3.2 "Le chantier de bénévoles ça coûte pas cher et ça peut rapporter gros"
On fait rarement des économies sur ce type d'action si l'on prend en compte le coût de la communication, l'achat d'outils, l'hébergement, la restauration, la location d'un minibus, l'encadrement ou l'animation. A quantité de travaux égale, un groupe de bénévoles travaille souvent moins vite qu'une entreprise (ou que les techniciens en charge de l'entretien du site) et le coût global du chantier est à peu près similaire.
3.3 "Le chantier de bénévoles fait concurrence au chantier d'insertion"
Les deux actions sont différentes, ayant chacune des motivations spécifiques. Lune permet de sensibiliser un public à priori intéressé par l'environnement, de former des naturalistes et des écocitoyens, ou de détecter des futurs stagiaires. Lautre permet de remettre en selle des personnes en difficultés, de les réhabituer aux règles du travail en entreprise, de leur redonner confiance, de leur faire découvrir un milieu qu'ils ignorent sans doute, ou de les conduire vers de nouveaux métiers.
3.4 "Les bénévoles ne savent rien faire"
"Certains pensent que les bénévoles constituent de la main d'oeuvre bon marché donnant un petit coup de main en échange du gîte et du couvert". Mais on constate en fait que les bénévoles peuvent apprendre rapidement le maniement d'outils, comprendre les techniques de gestion, ou réaliser des travaux techniques, à condition d'être encadrés et formés comme il se doit. En fait. les bénévoles savent tout faire. Quoiqu'il en soit. les participants sont tous pleins de bonne volonté et méritent qu'on s'en occupe bien.
3.5 "Un chantier c'est une colonie de vacances"
Avec un public jeune, les matinées réservées aux travaux et les après-midi consacrés à des animations, le chantier ressemblera peutêtre à un centre de vacances amélioré. Mais il existe bien d'autres manières de procéder. C'est avec le groupe que l'organisateur décide du contenu, des animations, du rythme de travail, des temps de loisirs, de découverte et de repos ... et donne le ton à SOll chantier.
3.6 "Le chantier nature est réservé aux écolos"
Quelle que soit l'origine sociale et géographique, l'âge, le sexe, la condition physique, la conviction politique, la religion, le régime alimentaire ... que l'on soit adolescent. papi ou étudiant. chômeur, fonctionnaire ou chef d'entreprise ... les chantiers nature s'adressent à tout le monde.